Pyongyang
– Dandong
30
novembre 2013
Enfin
une nuit où j'ai eu le temps de dormir. J'ai quand même passé une
mauvaise nuit, agité, l'estomac sens dessus-dessous, et la tête qui
tournait quand je me levais pour aller aux toilettes. Je n'ai pas
vomi mais je suis bien malade.
Départ du train pour la Chine à la gare de Pyongyang |
Les
guides des deux groupes nous ont accompagnés à la gare et nous ont fait leurs adieux depuis le quai. Dans le train nous accompagnait une
équipe de basketball féminine chinoise et casse-bonbons qui
bousculait tout le monde, pressée de circuler dans le couloir en
nous enjoignant d'avancer. Personne ne pouvait avancer. On attendait
tous que les gens s'installent. Puis notre train, un train chinois,
s'est ébranlé et nous avons traversé une campagne nord-coréenne
désormais familière, avec des champs jaunes carrés et gelés sur
lesquels des enfants s'amusaient à glisser accroupis en se
propulsant avec des bâtons. Beaucoup de gens au bord des voies, à
pied, à vélo. Des paysans travaillaient aux champs.
Paysage nord-coréen sans grand intérêt |
Pour
notre groupe de douze curieux de la Corée du Nord qui étions dans le train, c'était l'occasion de rigoler,
de parler de nos camarades de voyage, d'échanger nos impressions sur
ce voyage extraordinaire qui nous a laissé à tous une forte
impression. À midi nous sommes allés prendre un repas pas terrible
dans le wagon restaurant qui était, lui, coréen et froid, puis j'ai
fait une sieste quasiment jusqu'à l'arrivée à la ville frontière
de Sinuiju. Le train s'est arrêté près de deux heures pour la
déclaration en douane, le contrôle des passeports, la vérification
des bagages. Les douaniers sont montés pour faire les vérifications administratives, fouiller superficiellement le matériel informatique, les photos et/ou les bagages et s'assurer que nous repartons avec
notre téléphone portable. Un Allemand qui voyageait avec nous s'est
vu confisquer ses anciens wons nord-coréens qu'il avait achetés au
magasin de souvenirs, Antoine a dû allumer son ordinateur, ce qui
m'a donné de petites sueurs froides dans la mesure où quand on
ouvre mon ordinateur, on tombe directement sur ce blog. Je n'y dis
pas grand chose de très subversif mais comme le douanier ne comprend
pas le français mais qu'il peut certainement lire Pyongyang et
d'autres noms de lieux nord-coréens, il peut en déduire que j'écris
quelque chose sur son pays, ce qui peut me faire passer pour un
journaliste, or les journalistes, ils n'aiment pas ça en Corée du
Nord. Le douanier n'a pas ouvert l'ordinateur mais il a regardé les
photos. Au lieu de passer les photos en revenant en arrière, il les
a passées en revue rapidement en avant, c'est-à-dire à partir de
mon arrivée en Corée du Sud. Sans préméditation, j'ai donné un
aperçu de la riche Corée du Sud à ce brave soldat dévoué de la
Corée du Nord. Il a fouillé sommairement ma valise et m'a laissé
tranquille. Le train est resté statique pendant longtemps. Quand le
convoi est reparti, nous avions compris que nous étions tous dignes
de ressortir de la Corée du Nord. Adieu les agentes de la
circulation, l'architecture communiste, les toilettes nauséabondes,
le lavage de cerveau, les courbettes kimiesques, les épuisantes
journées de visite, le kimchi et une ambiance du tonnerre.
Au wagon restaurant du Pyongyang-Dandong |
Nous
avons enjambé le pont chevauchant le fleuve Yalu, qui marque la
frontière entre la Chine et la RPDC, ce qui nous a permis d'apercevoir le contraste flagrant
entre la Sinuiju nord-coréenne quasiment plongée dans la pénombre
et la Dandong chinoise lui faisant face, elle crachant ses lumières
du haut de ses grandes tours à la face de la Corée du Nord.
Le Pyongyang-Dandong, avec une basketballeuse chinoise et agaçante à l'intérieur |
Nous
avons passé l'inévitable contrôle douanier chinois, beaucoup plus rapide,
puis nous sommes sortis du train pour rentrer dans une gare bien plus
moderne que ce que nous avons vu pendant cinq jours en Corée du
Nord. J'ai dit adieu au reste du groupe qui remontait dans un train
pour Pékin, tandis que moi je suis parti avec mon guide chinois à
l'hôtel, situé fort pratiquement juste à la sortie de la gare. Je
n'ai eu que le temps de poser mes affaires avant de redescendre dans
le lobby me faire emmener manger par le guide. Il était 18h30 et je
n'avais pas faim. Je n'aurais pas eu faim non plus à 20h00 donc
autant le faire le plus tôt possible et être libéré tôt. Le
guide, Shan, est très sympa et m'a parlé de son pays, de la Corée du Nord et de l'économie chinoise. Dans le train, je m'étais
dit que ce que nous avons vu de la Corée du Nord devait être assez
similaire à ce que devait être la Chine il y a 30 ans. C'est ce que
m'a confirmé Shan, qui a vécu l'époque des rations et de la
période pré-Deng Xiaoping. Il m'a emmené dans un restaurant mal
noté pour l'hygiène où j'ai mangé des nouilles et une soupe aux
champignons, qui était très bonne mais extrêmement volumineuse.
Shan, qui a l'habitude de travailler avec des Occidentaux, semblait
faire attention à ne pas trop faire de slurps en aspirant ses
nouilles ou sa soupe. C'était très appréciable. D'un côté
j'apprécie la vie et la liberté relative qu'on a à être en Chine,
de l'autre, les bruits de bouche et les crachats par terre ne m'ont
pas du tout manqué quand j'étais en Corée du Nord.
D'un culte de la personnalité à l'autre : statue de Mao devant la gare de Dandong (Chine) |
Je
n'ai pas réussi à me connecter à Facebook avec mon téléphone et
j'ai, après trois heures de rédaction dans une chambre chauffée
néanmoins froide et sans eau chaude, encore malade, la flemme de descendre au lobby
pour essayer de me connecter.
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